Projet de construction modeste – charges modestes

Les prescriptions de protection incendie 2015 sont entrées en vigueur il y a deux ans. Elles exigent une assurance qualité conséquente, de la planification d’un projet de construction à la déconstruction d’un bâtiment. Dans la pratique, cette exigence est encore une source d’incertitude et de réserves. Elle contribue cependant à la réalisation de projets de construction plus économiques et mieux documentés.

Beat Neuenschwander, experte en protection incendie AEAI

Les prescriptions de protection incendie 2015 (PPI 2015) sont à de nombreux égards formulées de façon plus concrète que la version de 2003. Les architectes et les planificateurs étaient, à l’époque déjà, garants de la mise en œuvre des mesures de protection incendie structurelles et techniques dans les bâtiments. Dans les PPI 2015, cette exigence d’assurance qualité est cependant définie plus clairement et décrite en détail. Elle s’étend à l’ensemble du cycle de vie d’un bâtiment, de sa planification à sa déconstruction, en passant par son exploitation.

Bien que les PPI 2015 soient déjà en vigueur depuis deux ans, la notion d’assurance qualité demeure incertaine pour les propriétaires, les architectes et les planificateurs. Qui est responsable de faire respecter les mesures de protection incendie? Quels documents doivent être fournis aux autorités?

Responsable de l’assurance qualité en protection incendie

Les PPI 2015 définissent très clairement les responsabilités. Un responsable de l’assurance qualité en protection incendie (RAQ) est désormais requis pour chaque projet de construction. Celui-ci doit être nommé dans l’organisation de projet et est tenu de documenter la planification et la mise en œuvre des mesures de protection incendie, ainsi que de s’assurer de leur bonne réalisation dans les règles de l’art et de la technique. Les plus petits projets de construction ne requièrent pas de professionnel supplémentaire pour assumer cette responsabilité. En règle générale, le responsable de l’ensemble du projet ou l’ar­chitecte dispose des connaissances né­-cessaires en protection incendie et endosse la fonction du responsable de l’assurance qualité. Si le projet est plus conséquent, il doit être suivi par un spécialiste ou un expert en protection incendie.

Obligation pour les propriétaires

À la fin des travaux de construction, cette responsabilité est transmise aux propriétaires: ce sont eux qui doivent s’assurer que les charges de protection incendie soient bien respectées pendant toute la durée d’utilisation du bâtiment. La nouvelle déclaration dite de conformité a été introduite avec les PPI 2015. Par celle-ci, le propriétaire confirme que les mesures de protection incendie ont bien été mises en œuvre et que leur maintenance et leur entretien sont assurés. En signant cette déclaration, le propriétaire assume par ailleurs la responsabilité de l’adaptation des mesures de protection incendie en cas de transformation ou de réaffectation du bâtiment.

La déclaration de conformité doit également être signée par les propriétaires à la fin des travaux de toute nouvelle construction ou transformation, puis remise aux autorités de protection incendie.

Peu de documents pour les projets de construction modestes

Les projets de construction de taille modeste tels que les maisons individuelles et les petits magasins ou bureaux n’entraînent le plus souvent qu’une charge supplémentaire minime pour l’assurance qualité. Il ne faut présenter qu’un petit nombre de documents aux autorités. Outre la déclaration de conformité à la fin des travaux de construction, le type de concept de protection incendie (mesures constructives ou extinction, voir spécifiques) est également exigé lors de la demande du permis de construire. Celui-ci constitue la base pour l’élaboration des plans de protection incendie par les architectes ou les planificateurs et contiennent le plan de mesures de protection incendie aux niveaux structurel (architecturaux), techniques, organisationnels et le cas échéant de procédures d’urgences ou/et d’intervention. D’autres documents doivent être portés au dossier d’assurance qualité selon le projet. Dans le cas d’un immeuble, de construction massive, il faut par exemple encore ajouter des preuves de performance des portes coupe-feu, des installations thermiques et autres installations techniques. Il sera peut-être aussi nécessaire de fournir une preuve de performance supplémentaire pour les matériaux utilisés, tel que pour documenter la structure du toit plat ou de la façade par exemple.

Il y a actuellement quelques incertitudes pratiques au sujet du contenu et du détail du concept de protection incendie. L’AEAI a cependant publié la notice «Plans de protection incendie – Plans des voies d’évacuation et de sauvetage – Plans pour les sapeurs-pompiers» à ce sujet au début 2017.

Simplifier pour plus de liberté

Selon le projet de construction, les responsabilités et les obligations de documentation formulées plus clairement entraînent un certain surcoût. En contrepartie, les maîtres d’ouvrage peuvent profiter de plusieurs allègements. Les «bâtiments de taille réduite» en sont un très bon exemple. Il s’agit là d’une catégorie spéciale de «bâtiment de faible hauteur» (hauteur totale jusqu’à 11 mètres) présentant certaines limitations d’usage. Les «bâtiments de taille réduite» peuvent comporter au maximum deux étages au-dessus du sol et présenter une surface d’étage totale ne dépassant pas les 600 m2.

Selon les PPI 2015, de tels bâtiments sont en quelque sorte considérés comme des «maisons individuelles XL». Ils ne doivent satisfaire qu’à un nombre restreint d’exigences concernant le stockage des combustibles (citernes à mazout, stockage de pellets) ou des substances dangereuses (peintures et vernis contenant des solvants, stockage de pneus, etc.). Si ces éléments ne figurent pas dans le bâtiment de taille réduite, aucune résistance au feu n’est en principe exigée au niveau du système porteur ou des compartiments coupe-feu. Sur un bâtiment de taille réduite, les mesures de protection incendie prévues peuvent en général directement être indiquées sur les plans de construction. Un concept de protection incendie séparé n’est pas nécessaire.

De la documentation pour une planification plus sûre

Une protection incendie efficace et rentable ne se focalise pas uniquement sur les objectifs de protection définis par les prescriptions de protection incendie. Il est en effet décisif, pour les entreprises en particulier, de savoir quels sont leurs propres objectifs de sécurité, nécessaires à l’exploitation et pérennité de leur établissement. Un exemple pratique à ce sujet: les halles à un étage dont la surface ne dépasse pas 3600 m2 peuvent être construites en un seul compartiment coupe-feu. Une possibilité dans un premier temps bien alléchante au niveau des coûts de construction … Mais que se passe-t-il si un incendie se déclare dans une grande halle de ce type? Dans un cas grave, les installations de production et les stocks peuvent être endommagés ou même détruits d’un seul coup. Et dans le pire des cas, les bureaux de l’entreprise et des données importantes sont touchés. Ceci a pour conséquence un arrêt de la production et des livraisons pendant plusieurs mois, difficilement supportable pour la plupart des entreprises. Si l’on se base sur de telles réflexions, il peut être tout à fait judicieux de créer plus de compartiments coupe-feu que ce qui est exigé ou d’installer des systèmes supplémentaires de détection d’incendie, de sprinkler et/ou de désenfumage.

Il vaut donc la peine d’intégrer la protection incendie au projet durant sa phase de planification et de soumettre le concept à des réflexions stratégiques. Cela permet d’éviter des modifications à posteriori et ainsi, des coûts élevés. L’obligation de recourir à un responsable d’assurance qualité soutient ce processus. Car la qualité d’une planification sûr augmente avec l’exigence de documentation ainsi qu’avec les réflexions sur les mesures envisagées.

Diverses possibilités de perfectionnement

Une certaine pratique et une formation continue sont nécessaires pour pouvoir aborder de manière appropriée les PPI 2015 en général et le système de l’assurance qualité en particulier. Il existe aujourd’hui des offres adaptées au niveau requis pour presque tous les acteurs du domaine de la construction:

  1. Pour les planificateurs et les responsables de l’assurance qualité, l’AEAI et d’autres institutions proposent des cours de préparation à l’examen de spécialiste en protection incendie AEAI, d’expert en protection incendie AEAI ou de personne spécialisée certifiée.
  2. Le CAS Protection incendie dans la construction en bois est proposé par la Haute école spécialisée bernoise et le CAS Protection incendie pour les architectes sera proposé pour la première fois en 2017 sur mandat de la SIA.
  3. De nombreux séminaires spécialisés et formations de fabricants sont proposés aux artisans et praticiens. Ainsi, les fabricants de matériaux de construction ou les fabricants d’installations de techniques du bâtiment organisent diverses formations et séances d’informations.
  4. Les établissements cantonaux d’assurances immobilières et d’autres institutions prévoient des cours de protection incendie sur différents thèmes.

«Heureka», la plateforme d’information en matière de protection incendie de l’Assurance immobilière Berne, propose un aperçu du domaine thématique «Formation et perfectionnement». Cette plateforme met l’accent sur les petits projets de construction et présente la protection incendie de manière simple et compréhensible. Les architectes et les planificateurs peuvent y indiquer l’affectation et la taille d’un bâtiment pour trouver par exemple très facilement quel degré d’assurance qualité s’applique à leur projet de construction.

www.heureka.ch

Qu’entend-on par petit et grand projet de construction?

Sont considérés comme des «petits projets de construction» ou des «projets de construction de taille modeste» les projets de degré 1 de l’assurance qualité (AQ1). Les PPI 2015 définissent quatre degrés de l’assurance qualité: 1 (exigences les moins sévères) à 4 (exigences les plus sévères). La définition du degré d’un bâtiment dépend de son type de construction, de sa taille, de son affectation et des sources de dangers possibles. Les bâtiments d’une hauteur de 30 mètres maximum ayant une affectation d’habitation, de bureau, d’école ou de bâtiment agricole sont par exemple généralement classés au degré 1 de l’assurance qualité, à condition qu’ils ne présentent aucun risque particulier d’incendie. Si certaines zones sont exposées à un danger d’explosion ou si le bâtiment comporte une façade en bois, le degré de l’assurance qualité peut être plus élevé. Cette décision revient à l’autorité de protection incendie (par exemple à l’inspecteur du feu de la commune ou à l’assurance immobilière selon les réglementations cantonales). L’autorité compétente définit le degré de l’assurance qualité (DAQ) lors de la procédure d’octroi du permis de construire.

Un DAQ plus élevé implique des exigences plus lourdes en termes d’assurance qualité. Le concept de protection incendie devient plus vaste et plus complexe. À partir du degré 2 de l’assurance qualité, le responsable de l’assurance qualité doit en outre disposer d’une formation de spécialiste en protection incendie AEAI. Un délai transitoire est encore appliqué à l’heure actuelle. Il sera cependant nécessaire de fournir la preuve d’une formation achevée avec succès en 2020 au plus tard.